• 8. ☼~☼~~La Conscience claire~~☼~☼ Joyau des Joyaux ☼~☼

     

    agua, natureza, plantar, folha, flor, pétala
     
    Parcourir un chemin.
    Avec les incommensurables et subtiles écritures de  Shantideva
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    La Conscience est cet élément qui relie le tout au grand Tout. 
     
    Si nous prenons l'habitude de la "Reliance Cosmique", un bien grand mot pour cependant de toutes petites choses qui nous mènent vers de grandes choses (c'est toujours ainsi : ce sont les petites choses qui nous mènent vers les grandes réalisations) c'est trouver notre moyen de reliance à notre Conscience directe avec les notions d'Harmonie et de Bienfaits qui en découlent.
     
    "La petite voix intérieure" ou "extérieure", celle en tout cas de notre Conscience reliée au Divin, à notre source et notre intuition développée qui devient Conscience vivante et application de notre Conscience dans la matière et notre comportement. Le formatage dont nous pouvons avoir été victime ou des chocs ne permet pas toujours facilement d'y accéder. Mais il est un proverbe qui dit :"Dans le doute abstiens-toi"
    lorsque l'hésitation est là devant un choix. L'hésitation vient de notre conscience bien souvent. Les sentiments de peur et d'angoisse peuvent aussi nous guider. C'est d'en trouver leur source et de savoir que le monde subtil nous transmet des ondes de différentes substances.
     
    A nous de travailler cet aspect subtil de nos substances adéquates et d'oser le Silence de nos propres pensées afin de laisser place à la Pensée Divine afin qu'elle se dépose là où nous pouvons la recevoir en nous.
     
    Cette notion de Liberté d'Etre dans l'absolu, la Reliance jusqu'à ce qu'elle devienne permanente même si, étant humain nous ressentons les émotions nécessaires en acceptant que cela soit.
     
    Puiser à la Source au quotidien afin de nous fortifier : ceci est une discipline tout comme les Arts martiaux où notamment la force du Ki est exactement celle de la Source Divine s'écoulant en nous pourvu que nous fassions ce qui est utile pour la recevoir et vivre totalement de sa substance : nous entrons, alors, au fur et à mesure dans notre Etre Véritable.
     
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    Le Chi ou le Ki, le Shi : le point de reliance. A vous de le découvrir car il se trouve en plusieurs lieux et parfois des plus simples. Etant matérialisé aussi, nous avons besoin de cette matière pour y arriver et retrouver la Vraie Vie, pour ceux qui l'ont oubliée et qui ne sont pas nés conscients du fait d'éléments qui leur appartient au cours de leurs différents parcours.
     
     
    ☼☼~~La Conscience vivante~~☼☼
     
    Voici ce qui fut écrit  par Shandiveda  Le Bodhicharyavatara  बोधिचर्यावतार Bodhicaryāvatāra 
     
     
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    L'esprit d'aspiration est comme le souhait que l'on peut avoir de partir en voyage. Par exemple, on rêve de partir en Inde, on lit des guides de voyages, on se documente sur le pays, on imagine comment ce sera là-bas. Mais on n'est pas encore parti. L'esprit d'engagement est semblable au fait de faire les démarches nécessaires et prendre véritablement le départ. Il faut donc commencer toujours par aspirer au bien des êtres, de développer au plus profond de sa pensée cette aspiration bienveillante. Et quand on s'est vraiment imprégné de cet esprit d'Éveil d'aspiration, on commence à s'engager dans le bodhicitta en transformant ses faits et gestes, en agissant de toutes sortes de façon pour le bien de tous les êtres sensibles. C'est l'esprit d'Éveil d'engagement.

     

    Cet esprit d'Éveil occupe une place fondamentale dans la pensée de Shantideva. Shantideva voit l'existence comme une nuit des temps, obscure et embrumée dans laquelle aucune lumière ne vient à percer jusqu'au moment où un Bouddha se manifeste pareillement à un éclair ainsi que le disent ces vers fréquemment cités :

     

                    « Comme un éclair déchire la nuit
                      Obscure et embrumée l'espace d'un soudain instant, 
                      Ainsi par le pouvoir du Bouddha, apparaît chez les hommes
                      Une rare et brève pensée bienveillante »(§5, I)

    Alors revient aux hommes la responsabilité d'entretenir dans la durée cette lumière manifestée par le Bouddha sous peine de voir passer cet instant soudain d'Éveil et disparaître à nouveau dans l'oubli et les ténèbres. Et l'esprit d'Éveil est le moyen par excellence d'entretenir cette lumière.

                    « Ceux qui veulent détruire les milliers maux de l'existence,
                      Ceux qui veulent écarter l'insatisfaction chez les êtres
                      Et ceux qui veulent jouir de multiples joies,
                      Ceux-là ne doivent jamais abandonner l'esprit d'Éveil »(§8, I)

    ☼☼~~La Conscience vivante~~☼☼


     Le dévoilement des fautes

    Ce chapitre comprend deux parties: une offrande en esprit aux Bouddhas et aux grands Bodhisattvas ainsi que l'exposition de la prise de conscience des fautes commises sous l'emprise de l'ignorance. Le seul remède à ses errances est la prise de refuge et la confession des erreurs aux Protecteurs.

    L'offrande mentale se constitue des plus belles choses, des plus vastes et des plus précieuses que l'on puisse imaginer dans sa pensée. À titre d'exemple, citons ces vers:

     

                    « J'offre toutes les fleurs et les fruits, 
                      Toutes les formes de remèdes, 
                      Tous les joyaux de l'univers 
                      Et toutes les eaux pures et délicieuses; 
    
                      Les montagnes faites de pierres précieuses, 
                      Et de même, les bois, les solitudes plaisantes, 
                      Les arbres célestes aux parures de fleurs 
                      Et les arbres dont les branches ploient sous le poids des fruits, 
    
                      (…) Les lacs et les bassins ornés de lotus 
                      Et agrémentés du chant des cygnes; 
                      Toutes les choses qui n'appartiennent à personne 
                      Dans les limites des sphères de l'espace immense. » (§2,3 & 5,II)
    


    Et aussi:

                    « À ceux dont la nature est compassion,
                      J'offre des palais retentissants d'hymnes mélodieux,
                      Étincelants de festons de perles, 
                      Parures de l'espace infini » (§18, II)

    Le but de cet exercice spirituel est de ne plus orienter ses souhaits et ses espérances sur soi-même, un peu comme quand on rêve de toutes les choses magnifiques, maisons, voitures de luxe, voyages dont on pourra faire l'acquisition lorsqu'on tirera le numéro gagnant à la loterie nationale. Au contraire, on oriente ses vœux et ses espérances vers le Dharma du Bouddha, donc vers le bien de tous les êtres sensibles dans l'univers.


    La seconde partie est donc le dévoilement des fautes et commence par la prise de refuge dans les trois joyaux: Bouddha, Dharma et Sangha (ici plus précisément la communauté des Fils des Vainqueurs, c'est-à-dire des bodhisattvas). Shantideva invite ici à prendre conscience de toutes les fautes que l'on a commises dans cette vie-ci, mais aussi celles perpétrées dans les vies antérieures. S'ensuit une méditation sur le temps qui passe et la mort qui se profile nécessairement au bout de chaque vie.

                    « Le seigneur de la mort indigne de confiance, 
                    Ne s'attarde pas à ce qui est fait ou reste à faire. 
                    Car la vie est instable; 
                    Et malades ou bien portants, il frappe par surprise. » (§ 33, II)
    

    Or cette méditation de la mort rend nos actes mauvais accomplis en vue de buts temporaires complètement absurdes. On fait le mal pour obtenir quelques gains misérables qui se dilapideront et qui disparaîtront de toutes façons au moment de la mort. Et cette mort est inévitable, elle se rapproche de nous inexorablement.

                    « Laissant tout, je devrais partir seul. 
                    Mais n'ayant pas compris cela, 
                    J'ai commis maintes erreurs 
                    À cause d'amis ou d'ennemis. 
    
                    Mes ennemis ne seront plus, 
                    Mes amis ne seront plus, 
                    Moi-même ne serai plus; 
                    Et pareillement, rien ne sera plus. » (§ 34 & 35, II)
    

    Les gains s'évanouissent, mais les conséquences karmiques de nos fautes, elles, nous accompagnent à travers la mort. Face à cette peur, il est urgent de prendre conscience de toutes ses fautes, de s'en repentir et de prendre la ferme résolution de changer en bien et d'accomplir des actes méritoires qui apportent les bienfaits au monde.

     

    ☼☼~~La Conscience vivante~~☼☼

     La prise de l'esprit d'Éveil

    Dans le chapitre précédent, Shantideva parlait de la peur, de la tristesse et du sentiment de désolation que l'être juste éprouve face à ses fautes passées. Dans ce troisième chapitre au contraire, Shantideva exprime la joie et l'allégresse que l'on ressent en contemplant les bienfaits incommensurables de l'esprit d'Éveil. De manière générale, ce chapitre décrit et encourage l'esprit de don de soi et d'abnégation totale qui est celui d'un aspirant à l'éveil. Or ce don de soi est porté par l'élan et la joie d'apporter le bonheur au monde.

                    « Je prends plaisir et me réjouis 
                      De l'océan des vertus de l'esprit d'Éveil, 
                      Qui aspire au bonheur de tous les êtres
                      Et d'activité dispensatrice de bienfaits. » (§ 4, III)
    

    De cette joie profonde devant la contemplation de l'océan de vertus de l'esprit d'Éveil naît le souhait de venir en aide aux autres par tous les moyens possibles et imaginables et sous toutes sortes de formes également. Quelle que soit la situation, Shantideva en appelle à trouver le moyen adéquat, le "moyen habile", de venir en aide à son prochain, comme l'expriment ces vers célèbres du troisième chapitre :

                    « Puissè-je être 
                      Pour les malades
                      Le remède, le médecin et l'infirmier, 
                      Jusqu'à la disparition des maladies!
    
                      Puissè-je calmer par des pluies de nourritures et de breuvages
                      Les douleurs de la faim et de la soif, 
                      Et pendant l'âge des famines,
                      Puissè-je moi-même devenir nourriture et breuvage! 
    
                      Puissè-je être un inépuisable trésor
                      Pour le pauvre et le démuni;
                      Puissè-je devenir tout ce dont ils ont besoin, 
                      Et puissent toutes ces choses être à leur disposition! » (§ 8 à 10, III)
    

    Il y a fondamentalement l'envie d'être utile à autrui, être là pour soulager ses peines, l'aider dans son parcours de vie, le soutenir dans les moments difficiles et le guider pour le sortir des ténèbres. Pour Shantideva, il faut se poser la question de comment peut on être utile aux autres et aspirer avec joie à se rendre utile en toutes occasions. Même si ce n'est pas toujours possible, au moins peut-on entretenir cette aspiration de l'esprit d'Éveil à venir apporter du bien-être et du réconfort autour de soi et partout dans l'univers. Ainsi ces deux autres strophes célèbres:

                    « Puissè-je être le protecteur des abandonnés, 
                    Le guide de ceux qui cheminent, 
                    La barque, le navire et le pont
                    Pour ceux qui désirent traverser les eaux !
    
                    Puissè-je être un île pour ceux qui recherchent une île,
                    Une lampe pour ceux qui en désirent une,
                    Une couche pour ceux qui veulent prendre du repos, 
                    Et le serviteur des êtres souhaitant un serviteur !  » (§ 18 & 19, III)
    

    Servir autrui et se mettre constamment en position de servir est la devise de Shantideva. Son souhait le plus récurrent qu'il cherche à décliner par tous les moyens et sous toutes les conjonctures qui se présentent. Cette volonté d'être utile et d'aspirer au bien se manifeste même à l'égard de ceux qui nous font du mal:

     

                    « Que ceux qui m'insultent, 
                    Me nuisent 
                    Ou me raillent
                    Aient tous la fortune d'accéder à l'Éveil. » (§ 17, III)

    Pour Shantideva, il est vain de voir ternir sa joie profonde et sacrée, la joie infinie de l'Éveil par le ressentiment et la rancune à l'encontre de ceux qui nous accablent. Il est beaucoup plus agréable de les englober dans notre amour et notre compassion, que la joie de la libération des souffrances immerge ces sentiments malveillants. C'est alors que la force de vie peut l'emporter sur les passions néfastes et destructrices:

     

                    « Et jusqu'à ce qu'ils passent dans le nirvâna,
                    Puissè-je de toutes les manières être une source de vie
                    Pour l'ensemble du monde des êtres
                    Qui atteignent aux confins de l'espace ! » (§ 4, III)

    ☼☼~~La Conscience vivante~~☼☼

     L'attention

    Une fois cette joie et cet enthousiasme ayant lancé la dynamique de l'Éveil, il est de toute importance de ne pas voir cette dynamique se dissiper dans l'oubli et la confusion. Il faut toujours maintenir fermement l'engagement de développer en toutes circonstances l'esprit d’Éveil. Il serait trop bête de retomber dans les habitudes néfastes et de toujours commettre les mêmes fautes morales. Dans le quatrième chapitre, Shantideva enjoint donc le pratiquant sur le chemin de l'Éveil à ne pas perdre son application.

    Ce quatrième chapitre décrit également le tourment causé par les passions néfastes, « unique cause de l'augmentation des maux » (§ 34, IV)3. Le seul combat pertinent et légitime consiste alors à vaincre et détruire ses passions mortelles afin de pouvoir vivre une vie heureuse et sans crainte. Pour Shantideva, il y a par ailleurs quelque chose de tragique à perdre de vue le bodhicitta, l'esprit d'Éveil, pour retomber dans ces passions néfastes, et oublier d'un seul coup le bien-être de tous les êtres sensibles. En effet, l'esprit d'Éveil consiste dans le souhait profond d'apporter le bonheur et de délivrer de toutes les souffrances tous les êtres de l'univers. Perdre de vue cette aspiration revient à porter préjudice à l'ensemble de tous ces êtres !

                    « Car si moi-même suis diminué
                      En détruisant le bonheur d'un seul être
                      Que dire, lorsqu'est détruit le bonheur
                      Des créatures comprises dans l'infini de l'espace ? »(§ 10, IV)
    

    Pour ne pas s'égarer dans une errance sans fin dans la ronde du samsâra, Shantideva encourage le pratiquant à ne pas perdre l'esprit d'Éveil si fondamental et à mettre un terme à ce jeu de dupes où s'enchaînent perte et redécouverte de l'esprit d'Éveil. Cette pratique en dents de scie nous fera tourner encore et encore dans le samsâra et nous écartera pour longtemps des terres des bodhisattvas. Les fautes morales commises dans nos moments d'intermittence de la vertu risquent de nous empêcher de retrouver dans notre prochaine vie la précieuse existence humaine. Et sans le support d'un corps humain, il est presque impossible de cheminer vers l'Éveil.

    Donc nous avons la liberté incroyablement précieuse d'être né humain (ce qui est un privilège très rare dans notre univers) et en plus nous avons été mis au contact de cette liberté fondamentale qu'est l'esprit d'Éveil. S'en détourner maintenant, alors que nous sommes en connaissance de cause, serait quelque chose de particulièrement pitoyable.

                    « Il n'y a pire duperie,
                      Il n'y a pire folie
                      Que de ne pas cultiver le bien
                      Après avoir acquis une telle liberté. »(§ 23, IV)
    

    Si au moins on était dans l'ignorance du Dharma ou dans l'incapacité de le comprendre comme un chat ou une panthère, on pourrait comprendre la conduite insensée à l'encontre de la vertu et du bien des êtres. Mais celui qui sait et qui pourtant se perd complètement dans les passions destructrices et l'appât du gain, celui-ci s'expose frontalement à des remords et des regrets amers quand le temps aura passé et qu'il verra la vanité et l'inefficacité totale de ses mauvaises actions.

    Les passions destructrices ou émotions perturbatrices (skt. klesha) sont nos véritables ennemis parce qu'elles nous jettent dans le guet-apens des fautes morales et des renaissances malheureuses. Il est donc de première importance de garder une attention soutenue face à cet ennemi sournois et de le connaître intimement pour ne pas laisser se faire déborder par lui. Mais il y a un paradoxe :

                    « Les ennemis telles l'aversion et la soif 
                      N'ont ni jambes, ni bras
                      Et ne sont ni braves, ni intelligents.
                      Comment ont-ils pu faire de moi leur esclave ?
    
                      Tandis qu'ils habitent mon esprit, 
                      A leur guise, ils me frappent.
                      Sans m'irriter envers eux, je suis patient.
                      Pourtant, ce ne sont pas des objets de patience, mais de blâme !»(§ 28 & 29, IV)
    

    Les passions n'ont ni la force physique pour nous contraindre, ni une intelligence rusée pour nous tromper ; mais pourtant elles ont la puissance de nous conduire dans des destinées malheureuses comme les enfers. En fait, nous avons une patience incroyable envers elles : nous accueillons volontiers la colère, l'orgueil ou l'envie, alors que ces passions nous causent du tort de manière subtile ou évidente. Shantideva nous invite donc à trancher, avec cette grande tolérance envers les passions destructrices. C'est envers les êtres qui nous font du mal qu'il faut être patient et non pas envers les passions qui envahissent notre esprit ! Ces passions, il faut les combattre ! il faut éviter d'avoir de la colère contre les gens, les accueillir avec patience, mais on peut chasser sans ménagement et avec impatience cette colère de notre conscience !

                    « Passions, passions !  Où irez-vous une fois écartées de mon esprit,
                      Anéanties par l'œil de la sagesse ?
                      Où demeurerez-vous afin de me nuire?
                      Mais, faible d'esprit, j'en suis arrivé à ne plus faire d'effort. 
    
                      Les perturbations n'habitent pas les objets, ni les sens, ni l'intervalle, ni 
                                                                ailleurs. 
                      Où vivent-elles pour tourmenter le monde entier ?
                      Elles s'apparentent à des illusions; donc que mon cœur abandonne toute crainte  
                                                                 et s'applique à la sagesse, 
                      Car pourquoi, sans raison, devrais-je souffrir dans les enfers ?»(§ 46 & 47, IV)
    

    S'appliquer constamment à l'esprit d'Éveil permet de cultiver "l'œil de la sagesse" qui dissipera l'illusion des passions. Voilà pourquoi il est si important d'y accorder son attention encore et encore. Il n'y a pas de raison de se faire souffrir inutilement en perpétuant le pouvoir des passions destructrices.

     

    ☼☼~~La Conscience vivante~~☼☼

     

    Les chapitres 5 à 10 sont consacrés à la description des six perfections du bodhisattva  dans l'ordre suivant :

    La garde de la vigilance

                    « La garde de la vigilance
                      Se définit en bref comme 
                      L'examen répété
                      De l'état physique et mental » (ch.5;108)
    

    Ce chapitre traite donc de la perfection de discipline (ou vertu transcendante de discipline, en sanskrit : shila paramita). Il est remarquable de noter qu'au lieu de définir la perfection de discipline par les prescriptions et les règles d'une bonne conduite bouddhiste, Shantideva définit celle-ci par la garde de la vigilance, c'est-à-dire "l'examen répété de l'état physique et mental". Pour lui, cette vigilance est la clef de voûte de la discipline. Si on ne garde pas l'esprit, celui-ci peut devenir incontrôlable et destructeur:

                    « Aucun éléphant ivre et indompté
                      Ne pourrait faire autant de mal 
                      Que notre esprit qui, livré à lui-même,
                      Nous inflige les maux des Enfers Insurpassables »(§2, V)
    


    Il est primordial de dompter son esprit afin de dompter ses démons, ses peurs et ses tentations. Tous ceux-ci sont des créations de l'esprit ; et donc, dans l'univers, rien n'est à craindre que l'esprit incontrôlé et cédant aux passions furieuses et destructrices. Car c'est l'esprit qui travaille et construit notre réalité heureuse ou malheureuse.

     

                    « C'est ainsi que Celui-qui-dit-vrai
                      A montré que les peurs 
                      Et les insondables souffrances
                      Émanent toutes de l'esprit »(§6, V)
    

    Veiller à l'esprit, c'est donc lui permettre de se développer harmonieusement et donc de contribuer activement à l'harmonie du monde. C'est donc le point-clef de la discipline pour Shantideva; et cette garde de la vigilance prévaut largement sur les autres préceptes : " À quoi bon trop d'austérités ? La garde de mon esprit sera ma seule ascèse !" (§ 18, V) Cet impératif de l'attention et de la vigilance peut toutefois être relâché en certaines circonstances :

                    « Si dans certains cas, un danger ou une fête, 
                      Ce n'est pas possible, agissez à votre gré. 
                      Au temps de la générosité, est-il dit, 
                      On peut se détendre en matière de discipline. »(§42, V)
    

    Si on est poursuivi par un tigre, on ne sera peut-être vraiment dans la situation adéquate pour être parfaitement attentif à son état physique et mental. On n'a que la préoccupation de fuir à toute jambe ! Pareillement, pendant la fête, l'attention peut aussi momentanément se relâcher pour goûter à ce moment de joie partagée. Cette strophe 42 est très notable du fait de cette irruption soudaine de la fête dans un texte par ailleurs très ascétique !

    Cette garde de la vigilance a le grand avantage de nous permettre de nous tenir éveillé quand on se serait tenté de céder à la colère ou des comportements nuisibles pour nous-mêmes et pour autrui. La garde de vigilance nous permet de "rester de bois" quand cela se produit. La garde de la vigilance permet de ne pas être obnubilé par l'illusion du corps. Le corps est imparfait : il est voué à la maladie, au vieillissement et à la mort; et pourtant, nous le chérissons. Être attentif à ce corps permet de s'en détacher et de ne plus en être l'esclave. Shantideva encourage alors le pratiquant à s'en servir comme d'un véhicule pour venir en aide aux êtres vivants, et non plus comme l'objet de toute notre affection (et donc aussi de tous nos soucis).

                    « Considérons ce corps comme un navire,  
                      Un moyen d'aller et de venir, rien de plus, 
                      Et transformons-le en corps d'exaucement 
                      Pour accomplir le bien des êtres. » (§70, V)
    

    Ainsi, on sera attentif et attentionné aux autres. On traitera les autres avec douceur. On ne les importunera pas et on ne leur imposera pas notre présence vulgaire, bruyante ou envahissante en restant discret.

                    « Le héron, le chat et les voleurs  
                      Se déplace furtivement sans faire de bruit, 
                      Et c'est ainsi qu'ils atteignent leurs fins :
                      Les sages devront toujours les imiter. » (§73, V)
    

    Le pratiquant spirituel sera aussi particulièrement attentif à tous les enseignements de sagesse d'où qu'ils viennent. Il sera attentif aux qualités des autres et s'en réjouira vivement. Se réjouir des réussites des autres est source d'une grande joie et la base du sentiment de la communauté et de la solidarité. Il en ressort d'innombrables bienfaits. De manière générale, chaque rencontre doit être vue comme une occasion d'Éveil :

                    « Quand nous posons les yeux sur un être,  
                      Que ce soit avec franchise et bienveillance,  
                      Et pensant que c'est grâce à lui
                      Que nous atteindrons la bouddhéité.» (§80, V)

    ☼☼~~La Conscience vivante~~☼☼

    La patience

    Cette perfection est représentative d'un Mahayana gradualiste à l'extrême. En effet, dans cette perspective graduelle :

                    « Un moment de colère détruit 
                      Toutes les activités salutaires (…)
                      Accumulées au cours de mille périodes cosmiques. »
                                                          (6;1)
    

    Shantideva y stigmatise la colère comme le pire mal, le pire ennemi du bonheur. Face à ce mal dévastateur, l'antidote est la patience. Et cet antidote a d'autant plus de valeur aux yeux de Shantideva que ce mal est dangereux:

                    « Il n'y a pas de faute comparable à la colère
                      Et pas d'ascèse comparable à la patience.
                      Par conséquent, je cultiverai la patience
                      Avec zèle et de multiple façons. »(§2, VI)
    

    À partir de cette prémisse selon laquelle la colère est la pire des fautes et la patience par conséquent le meilleur des remèdes (puisqu'il contribue à éradiquer ce mal, la colère), Shantideva développe une logique particulièrement saisissante qui fait de ce sixième chapitre exposant la perfection de patience un sommet du Bodhisattvacharyavatara. On va essayer ici de donner les grandes lignes de ces raisonnements sur la colère et la patience.

    La colère envenime notre vie par sa force de destruction. Tout doit être mis en l'œuvre pour l'enrayer. C'est pourquoi il faut analyser tous les maux que la colère provoque et comprendre d'où elle vient. La colère naît de nos frustrations et des douleurs ressenties lors des épreuves et des problèmes qui se dressent devant nous et font obstacle à nos désirs et à notre volonté.

                    « Se nourrissant du mécontentement
                      Né de l'accomplissement de ce que je ne veux pas 
                      Et des obstacles à ce que je veux,
                      L'aversion s'accroît et me détruit. »(§7, VI)
    

    Ces problèmes et ces déboires sont la source de tracas, de soucis, d'inquiétudes, d'irritations et de ressentiment. Pourtant on ne devrait pas s'en faire. En effet :

                    « S'il y a une solution, 
                      Pourquoi s'attrister ? 
                      S'il n'y a pas de solution, 
                      Pourquoi s'attrister ? »(§10, VI)
    

    S'il y a une solution, on devrait tout mettre en œuvre pour trouver cette solution et rester dans la joie d'être en train de résoudre les problèmes qui nous accablent. S'il n'y a pas de solution, on peut avoir le cœur léger puisqu'il n'y a qu'à lâcher prise, se laisser aller au cours des choses et accepter notre sort avec sérénité. La colère ne servira à rien puisqu'il n'y a pas de solution ; la colère ne fera qu'assombrir ce qui est déjà bien pénible comme ça !

    Il faut donc à apprendre à endurer la souffrance et la douleur sans s'énerver et sans perdre patience. Il faut apprendre à ne pas laisser la colère nous agiter de rage et diriger nos mouvements et nos jugements. Cela doit se faire selon un processus très graduel. Progressivement, on abandonne la colère en augmentant notre capacité à endurer des situations de plus en plus pénibles. Il faut commencer par de toutes petites choses comme savoir patienter en attendant le bus ou endurer un piqûre de moustique, et puis progressivement, notre patience se renforce, nous rendant maîtres de nous-mêmes face à de lourdes épreuves et de grandes adversités.

                    « Il n'est rien qui, par l'accoutumance,
                      Ne devienne aisé.
                      Aussi en vous familiarisant avec de moindres maux, 
                      Apprenez à en supporter de grands. »(§ 14, VI)
    

    Le véritable combat n'est donc pas contre notre ennemi détesté, mais contre la colère, notre véritable ennemie. L'héroïsme consiste donc à vaincre notre haine.

                    « Ceux qui, dédaignant la souffrance, 
                      Détruisent l'aversion et autres ennemis, 
                      Sont d'héroïques vainqueurs.
                      Le reste n'est que tueurs de cadavres. »(§ 20, VI)
    

    Shantideva nous incite alors à changer radicalement notre point de vue sur la souffrance et à en voir les qualités cachées.

                    « Par ailleurs, la souffrance a d'excellentes qualités :
                      Nous affligeant, elle dissipe notre arrogance,  
                      Nous rend compatissant envers les êtres du samsâra,
                      Nous fait éviter les fautes et aimer la vertu. »(§21, VI)
    

    En outre, la colère comme tous les autres phénomènes est produite à partir de causes et de conditions extérieures à l'individu qui se met en colère contre nous. Quand on voit cet enchaînement de causes qui conduisent à l'émergence de cette colère, on commence à relativiser cette colère. De la même façon qu'on ne s'emporte pas contre une maladie qui nous accable, on ne devrait pas s'emporter non plus contre les êtres conscients car eux aussi sont poussés dans leurs actions par des causes et des conditions qui les contraignent à agir comme ils agissent :

                    « Toutes les fautes, 
                      Toutes les variétés d'erreurs  
                      Se produisent par la force de conditions;
                      Elles ne sont pas indépendantes.
    
                      (…)Ayant compris cela, je ne m'irriterai pas
                      Contre des phénomènes analogues à des apparitions.
    
                      Par conséquent, à la vue de l'activité incorrecte
                      D'un ami ou d'un ennemi, 
                      Il faut se dire: "Cela provient de telles et telles conditions"
                      Et demeurer dans la joie. »(§25, 31 & 33, VI)
    

    Les personnes sous l'emprise des passions néfastes se nuisent à elles-mêmes ; elles vont même jusqu'à se suicider. Pourquoi donc épargneraient-elles les autres dans leur fièvre destructrice ? Il faut ainsi chercher à comprendre l'enchaînement causal qui les pousse à agir comme cela, afin de se détacher de nos jugements de colère et de ressentiment à leur encontre. On pourrait alors arriver à deux conclusions opposées quant à la nature de ce mal en eux : 1°) ces gens colériques et malveillants sont mauvais par nature ; 2°) ces gens colériques et malveillants ne sont en colère et dans la malveillance qu'à la suite de certaines circonstances accidentelles. Cette colère est due à des causes particulières et disparaîtra à un moment ou à un autre.

    Dans le premier cas, il ne faut pas se mettre en colère, parce que si leur nature est d'être mauvais, ils n'y peuvent rien. Il faut les accepter comme ils sont, de la même façon qu'on sait que la nature du feu est de nous brûler si on le touche.

                    « S'il était dans la nature des puérils 
                      De nuire à autrui, 
                      Il serait aussi inopportun de s'irriter à leur endroit
                      Que contre le feu dont la nature est de brûler. »(§39, VI)
    

    Dans le second cas, la colère est aussi inopportune parce que c'est une affectation passagère extérieure à la personne en colère.

                    « Et si ces fautes étaient accidentelles
                      Aux êtres dont le caractère est stable, 
                      La colère à leur égard ne serait pas plus logique à leur égard
                      Que contre le ciel envahi par la fumée. »(§40, VI)
    

    Dans les deux cas, il vaut mieux abandonner la colère, car c'est cette colère qui a poussé l'autre à me nuire et c'est cette colère qui pourrira durablement ma vie si je lui cède. C'est donc bien la colère notre véritable ennemie :

                    « Alors qu'en vérité, je suis frappé par le bâton,
                      Je m'irrite contre celui qui le manipule;
                      Or, lui-même étant secondaire et mû par l'aversion, 
                      Il serait correct de me fâcher contre elle.  »(§41, VI)
    


    Shantideva invoque alors la loi du karma qui explique que les maux subis dans cette vie sont le résultat d'actions malveillantes accomplies dans le passé (de cette vie ou d'une vie antérieure) et que l'on paie aujourd'hui.

     

                     « Auparavant j'ai accompli des méfaits
                      Semblable envers les êtres; 
                      De ce fait, il est juste que ces maux
                      Rejaillisse sur moi qui ai nui aux autres. »(§42, VI)
    

    Donc si je subis des méfaits, c'est la conséquence de mes actes passés qui avaient causé des torts aux autres. Or comme on l'a vu plus haut: "il n'y pas d'ascèse comparable à la patience" (§2, VI). Si donc maintenant je pratique la patience, je vais m'élever spirituellement et goûter de suprêmes félicités tandis que mes bourreaux vont tomber dans les enfers du fait de leurs mauvaises actions sous l'emprise de la colère. La relation s'inverse : je suis leur bourreaux tandis que les bourreaux sont mes victimes !

                     « C'est poussé par mes actions 
                       Qu'apparaissent mes persécuteurs.
                       Si à cause de leurs méfaits, ils tombent en enfer, 
                       Ne suis-je pas leur meurtrier ?
    
                       M'appuyant sur eux, je purifie de nombreuses fautes
                       Par l'exercice de patience;
                       S'appuyant sur moi, ils tomberont pour longtemps 
                       Dans les souffrances infernales. 
    
                       Puisque je suis leur persécuteur
                       Et qu'ils sont mes bienfaiteurs,
                       Pourquoi, esprit cruel, 
                       T'emportes-tu de manière erronée ? »(§ 47-49, VI)
    

    Dans cette vue de l'esprit, l'ennemi n'est plus un ennemi, mais l'occasion rêvée de pratiquer l'ascèse de patience, la voie royale vers l'Éveil et la félicité ! On devrait donc se féliciter de faire pareille rencontre ! C'est là le retournement qu'opère Shantideva dans ce sixième chapitre du Bodhicharyavatara : Shantideva change radicalement notre façon de voir les tourments qu'on nous fait endurer afin de nous libérer de tous ces jugements que nous opérons en permanence et qui finissent par nous emprisonner. Le bourreau, l'ennemi est l'occasion de pratiquer la patience au même titre que le mendiant est l'occasion pour moi de pratiquer la générosité :

                     « Le mendiant qui se présente en temps opportun
                       N'est pas un obstacle au don;
                       Et l'on ne peut dire que celui qui confère les vœux
                       Soit un obstacle à l'ordination !
    
                       Il y a bien des mendiants dans ce monde,
                       Mais rares sont les offenseurs,
                       Car si je nuis pas, 
                       Peu de gens me nuiront. 
    
                       Ainsi, tel un trésor surgi dans ma maison
                       Sans effort pour l'obtenir,
                       Je dois aimer mon ennemi, 
                       Car il m'assiste dans ma carrière vers l'Éveil. »(§ 105-107, VI)
    


    On pourrait alors penser que refuser de répondre à la colère et à la haine par la violence risque de nous coûter la vie. C'est un risque que Shantideva prend effectivement en compte (même si répondre par violence n'est pas non plus une garantie de rester en vie) ; mais pour Shantideva, la vie n'en vaut pas la peine si c'est pour vivre en accomplissant toutes sortes de turpitudes et créant la douleur pour soi-même et les autres. Par ailleurs la vie est comme un rêve illusoire. Au réveil, ce rêve disparaît, quelle qu'ait été sa durée :

                     « Mieux vaut la mort aujourd'hui même
                       Qu'une longue vie par des moyens d'existence erronés,
                       Car même si les gens comme moi vivent longtemps, 
                       Ils n'évitent pas les souffrances du trépas.
    
                       Une personne éprouve en rêve un siècle de bonheur; 
                       Où est ce bonheur au réveil ?
                       Une autre éprouve un instant de bonheur; 
                       Où est ce bonheur au réveil? »(§ 57-58, VI)
    

    La colère à l'égard de ceux qui blasphèment contre le Dharma n'est pas non plus propice. En effet, les Bouddhas sont complètement détachés des choses matérielles de ce monde. Que leur importe de perdre un lieu de culte ou une statue en or à leur effigie ?

                     « S'emporter contre ceux qui outragent
                       Les statues, les stoupas
                       Et le sublime Dharma est inapproprié, 
                       Car les Bouddhas n'en souffrent pas. »(§ 64, VI)
    

    Face à de tels blasphémateurs, pratiquer la sagesse, l'esprit d'Éveil, la bienveillance et la patience sont certainement de meilleurs moyens d'honorer et respecter les Bouddhas.


    De manière générale, le détachement est indispensable pour cultiver la patience. En effet, c'est l'attachement à un objet qui nous plonge dans la détresse quand nous perdons cet objet ou que celui-ci est détruit. C'est pourquoi il est important de remédier d'abord à cet attachement :

                     « Par exemple, quand le feu a pris dans une maison
                       En atteint une autre,
                       Il est avisé de retirer la paille et autres matières
                       Qui pourraient causer sa propagation. 
    
                       De même, quand le feu de l'aversion se propage
                       Vers ce par quoi mon esprit est attaché, 
                       De peur que mes mérites ne soient consumés, 
                       Je dois à l'instant abandonner cet attachement.» (§ 70-71, VI)
    

    Il est ainsi particulièrement judicieux selon Shantideva de ne pas s'attacher à la bonne réputation et à la réussite

     

    ☼☼~~La Conscience vivante~~☼☼

     

     
     
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  • Commentaires

    2
    Lundi 3 Juillet 2017 à 03:11

    Bonjour Antilope, Ce en quoi tu as totalement raison. Vivre dignement  : tellement important. Merci de ton Amitié fidèle et de ton passage qui me fait tant plaisir. Amitié. Coline.

    1
    Antilope
    Mardi 27 Juin 2017 à 07:58

    Bonjour Coline. Il-y-a longtemps qu je pence que le chemin de vie est la eilleur des ècoles pour vivre dignement. Merci pour ce texte.

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